La tempête Xynthia et ses conséquences nous amènent à compléter notre vision sur l'aménagement de la Croix de Villeroy, revoir le constat "Air" initial, considérer les conséquences prévues de cet aménagement et à envisager les décisions que pourraient prendre alors les autorités lors de sa mise en service.
Un bref et succinct regard sur la tempête XYNTIA
La tempête Xynthia est venue nous rappeler qu'ignorer les réalités de la nature n'était pas suffisant pour éviter les catastrophes. Et qu'un laissez passer administratif, "un permis de construire" ne garantissait pas l'absence de risque. "Les institutions" qui ont délivré les permis peuvent se réveiller, constater "étonnées" qu'ils existent des constructions en zones inondées, dessiner des "zones noires" et décider qu'il faut prendre des mesures à la hauteur.
Pourtant ni le climat, ni le niveau des océans, ni le niveau des sols n'ont été redéfinis. Simplement des situations qui étaient hier prévisibles et potentielles (au moins pour des personnes compétentes en aménagement) se sont concrétisées.
Ce qui hier aurait paru absurde, une idée d'écologiste "jaloux-et-rétrograde", est devenu une évidence. Il ne fallait pas construire là. Pire, il faudrait démolir.
Vous pouvez voir ici une carte Google de la zone sinistrée à la Faute sur Mer. Un joli coin protégé par une digue.
Il est aussi possible de voir que la topographie des lieux n'était pas un secret. Pour cela vous pouvez consulter la carte des niveaux
Et enfin les résultats à l'issue de la tempête .
Dans nos sociétés démocratiques évoluées nous votons, nous donnons notre confiance à nos représentants et aux institutions, émanations plus ou moins directes de nos choix démocratiques. Chacun ne peut être informé sur tout et s'occuper de tout. Pour beaucoup d'entre nous : autorité des institutions, compétence, sérieux et sécurité des décisions sont des évidences non discutables. Pouvons nous faire confiance de façon aveugle ? Les événements autour de Xynthia créent un doute sérieux.
Dans le cas présent, il ne nous appartient pas de juger du bien fondé des décisions prises mais nous sommes abasourdis. Avant la catastrophe, rien ne pouvait arriver, les actes des élus étaient rassurants. Aujourd'hui une carte des zones devenues inhabitables, les "zones noires", choquent les populations. Les traumatismes se cumulent. L'aspect financier n'est qu'un volet.
Nous compatissons et souhaitons beaucoup de courage aux victimes ...
Un regard actualisé sur l'aménagement de la Croix de Villeroy.
La carrefour Nationale 6/Départementale 33 à la Croix de Villeroy en Essonne va être réaménagé. Il est vu par beaucoup comme un obstacle à la circulation fluide sur la Nationale 6 et, de fait, limite drastiquement les flux. Le constat fait dès 2000 sur les limites de l'aménagement actuel sont bien réels. Le trafic sur la Nationale 6 plafonne vu la "pénalité" que constitue le franchissement de ce carrefour quelle que soit la direction.
D'une manière imagée mais pertinente il peut être dit que
le carrefour à feux de la Croix de Villeroy joue le rôle de digue pour le trafic de la Nationale 6. Le trafic sur la N6 et les voies tributaires immédiates D33, D54 reste limité. Un but de l'aménagement est de supprimer la digue pour libérer les flux. |
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Le long de la Nationale 6, la situation en termes de pollution, bien que non satisfaisante, est en voie d'amélioration lente. En l'absence de hausse du trafic, il est possible de penser que vers 2015/2020 la qualité de l'air resterait mauvaise mais que les concentrations de polluants passeraient en dessous des valeurs limites pour la santé humaine réglementaires en 2010.
Ci-dessous la carte de la pollution en 2004.
Une grande partie du quartier Sud est polluée et la pollution pénètre la forêt en profondeur. Le taux de concentrations de polluants sur les voies elles-mêmes n'est pas soumis à réglementation. Les valeurs élevées relevées tant sur la Nationale 6 (couleur rouge), la D33 - Avenue de Général Leclerc - et sur l'avenue de la forêt (couleur jaune) créent une suspicion lourde sur la qualité de l'air pour les habitations à proximité.
Depuis 2004, deux évolutions jouent en sens contraires : la hausse du trafic et l'amélioration technologique des automobiles. Selon les prévisions de 2004, en heure de pointe, le trafic croitra à Brunoy sur la Nationale 6 de 3810 en 2004 à 6100 véhicules heures à l'issue de la la mise en service de l'aménagement (initialement 2010) soit une hausse de l'ordre de 60 %. Les baisses annuelles d'émission de polluants liées à l'amélioration technologique des véhicules ne peuvent pas compenser une telle hausse.
En 2004 la situation était non satisfaisante à Brunoy et les valeurs relevées indiquées que les concentrations de polluants étaient au delà des valeurs limites pour la santé humaine sur de larges étendues habitées. Il importe d'observer qu'il n'y a pas eu de mesures relevées sur la D54 (Avenue du Général Leclerc) au delà de la rue d'Orléans. La concentration de polluants, notamment au croisement avec la rue du chêne (école) et au croisement avec la rue de Montgeron, aurait mérité d'être connue.
Les prévisions réalisées dans le cadre des études Air en 2004 ont estimé partiellement les évolutions de la pollution. Elles ont intégré les évolutions technologiques des véhicules. La batterie d'outils de modélisation utilisés est impressionnante. Les résultats sont inquiétants.
D'après ces études la pollution augmentera le long de la Nationale 6. Le nombre de personnes soumises à des concentrations de polluants supérieures aux valeurs limites pour la santé humaine croitra. Pour le dioxyde d'azote ce nombre passera de 1478 à 2041 soit une hausse de 38%. En conséquence, il est clair que les surfaces soumises à une pollution hors normes croitront.
Il est affirmé dans les documents d'enquête qu'aucune mesure pour la santé humaine n'est envisagée pour ce projet.
Or les directives européennes et leur transposition en droit français rendent les valeurs limites des concentrations de polluants impératives pour 2010. ( 40µg/m3 pour le dioxyde d'azote). A partir de 2010, aggraver une situation déjà en dehors des valeurs limites ou dépasser les valeurs limites est interdit. |
Question
En 2012 à la mise en service de l'aménagement, sauf récession économique majeure ramenant le trafic à celui de 2004, le constat sera fait d'une qualité de l'air mauvaise nuisant à la santé de nombreuses personnes. Quelles alternatives se présenteront aux autorités (préfecture notamment) ?
- Ne pas voir la situation/ ignorer les textes en vigueur. Le problème du non respect de la santé humaine se posera alors.
- Limiter le trafic à un niveau compatible avec le respect des valeurs limites. Dans ce cas se posera la question gênante de savoir pourquoi a été construit cet ouvrage "pharaonique" et coûteux.
- Définir comme "zones noires", donc inhabitables, les étendues soumises à des taux de pollution interdits par le cadre réglementaire. Pour la mise en oeuvre de zones noires, il existera le préalable créé suite à la tempête XYNTHIA. Nul ne pourra contester ici aussi l'importance de veiller à la santé et à la vie humaine. N'oublions pas que l'aménagement de la Croix de Villeroy (près de 20 millions d'euros) devrait "économiser" 0,16 morts d'accidents par an. Il ne serait pas crédible de tuer plus par l'accroissement de la pollution.
L'espace ainsi récupéré par les "zones noires" permettrait un aménagement de la Nationale 6 en voie rapide/boulevard urbain. Un aménagement de type périphérique parisien (pas de feux et bretelles d'entrée sortie) serait dès lors possible avec, éventuellement une voie supplémentaire pour les bus. Bien sur, l'avenue du général Leclerc devrait aussi être reconsidérée et aménagée, surtout pour rendre efficace la connexion entre Nationale 6 et Nationale 19.
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Epilogue
Ce qui arrive aux victimes de Xynthia est riche d'enseignements. A titre de réflexions et d'après la carte ci-dessus de l'étude Air de 2004, chacun peut essayer de déterminer quelles pourraient être les "zones noires" sur le quartier Sud de Brunoy. A cet effet, une carte Google du quartier figure ci-dessous.
Et nous invitons chacun à observer les rôles des acteurs concernés par la tempête XYNTHIA pour mieux comprendre. Notamment, en cas de situations graves, savoir qui est responsable, qui décide et qui prend les décisions.
Déjà nous pouvons constater que des prises de conscience tardives peuvent être énergiques
Il nous reste à apprécier les effets de la mobilisation des victimes.
Version 01 du 12 avril 2010